Les Dires de Zeta: Obélisque de Corail


De nombreux artistes choisissent leur matériau plus pour son originalité que pour des raisons pratiques, ce qui est la meilleure façon de se faire connaître. Emballer une île dans un sac plastique coloré ou l’entourer de ballons flottant de toutes les couleurs est plus un événement médiatique qu’un art, mais si c’est fait par quelqu’un qui revendique d’être un artiste, il semblerait que cela lui donne ses lettres de noblesse. Un artiste craignant de passer inaperçu choisira son moyen d’expression plus pour la probabilité qu’il attire l’attention que pour tout autre chose.

C’est donc l’histoire d’un pauvre immigrant qui avait plus de talent que d’argent, pour être sans sponsors dans un pays étranger, et sans même les fonds nécessaires à l’achat de matériel. Il se tourna vers ce que la nature prodiguait, et en tira plus d’un avantage, car son choix du corail était à la fois bon marché, celui-ci étant à portée de main, et tout à fait original. Très à l’aise dans la mer, cet artiste utilisa diverses techniques pour sculpter le corail, qui croît lentement et ne peut vivre que sous la surface de l’eau. La plupart du temps il opérait des greffes, en taillant soigneusement des morceaux pour les assembler ailleurs sans jamais les sortir de l’eau de mer dont a besoin le corail pour vivre. Les entailles se résorbèrent avec le temps, en donnant l’apparence d’un corail naturel ayant poussé en formant ces structures étranges. Si cette œuvre amena la célébrité à l’artiste, et qu’elle permit certainement à son talent de s’exprimer, elle ne le rendit pas riche pour autant. Tout comme son matériau était gratuit, la contemplation de son œuvre le fut elle aussi, tel un legs destiné à effrayer le nageur ignorant qui tomberait dessus.